« Les coûts de traitement herbicide des chardons s’avèrent onéreux, près de 40 €/ha. De plus, dans certaines cultures, ils peuvent créer de la phytotoxicité. En utilisant des drones pour ne traiter que les zones infestées, les économies peuvent être substantielles », constate Aline Dupont, ingénieure en agroéquipements connectés de la chambre d’agriculture de la Somme. Les chambres départementales des Hauts-de-France (sauf celles de l’Oise) proposent pour la première fois une solution d’imagerie par drone pour cibler et traiter les ronds de chardons dans les betteraves. Cette adventice vivace, répartie en tâches, se prête bien à ce type de technique. « Cette solution diminue les IFT. Dans nos essais, nous baissons la dose d’herbicide chardon de 80 %, poursuit l’experte en nouvelles technologies. Soit une économie de 32 €/ha, auxquels il faut soustraire le coût du service de 16 €/ha ».
Frappes ciblées
Les chambres de Hauts-de-France ont retenu le prestataire Abelio qui détecte tous les chardons sur le rang et entre les rangs. L’agriculteur intéressé doit disposer d’un pulvérisateur équipé d’un GPS et d’une console débloquée pour la coupure de tronçons et la modulation. Le drone, équipé d’un capteur multispectral, survole les parcelles à partir du stade 4 feuilles vraies et avant le stade 10 feuilles des betteraves, et pour le chardon un stade développé. Grâce à des algorithmes développés spécifiquement pour reconnaître les chardons, une carte détermine les frappes ciblées. Insérée dans la console du pulvérisateur, elle actionne ou non la coupure de tronçon.
« C’est différent d’une modulation de dose classique, prévient l’ingénieure. La pulvérisation se fait alors sur toute la rampe et la dose change. Ici, la dose est constante, avec une action sur l’ouverture et la fermeture des tronçons ». Cette année sera une année test. Tous les pulvérisateurs ne répondent pas de la même façon pour la compatibilité avec la carte de frappes ciblées ou pour la réactivité de la coupure de tronçons. Les temps de réaction dans la coupure du tronçon varient. (En une seconde, à 12 km/h, le pulvérisateur parcoure 3.30 mètres). Une autre utilisation possible est d’avoir « la carte de frappe cible » sur son smartphone avec les coordonnées GPS et de fermer les tronçons manuellement. Mais cela reste moins précis et moins confortable pour l’agriculteur.
Ce service existe aussi pour les daturas dans les haricots et le maïs. La chambre de la Somme poursuit ses travaux en collectant les images de chardons, de laiterons et de datura sur blé et betteraves. Avec, pour but, le développement d’algorithmes pour d’autres utilisations. L’usage du drone évolue. Auparavant, la chambre d’agriculture proposait des services de calcul de fertilisation azotée par drone. « Aujourd’hui, nous utilisons uniquement les images satellite (Sentinel). Une résolution de dix mètres suffit pour l’épandage d’azote. Cela permet de diminuer le prix du service. Le drone reste néanmoins pertinent pour toutes les applications nécessitant une résolution de l’ordre du centimètre, comme la détection d’adventices ou encore le comptage de pieds », continue Aline Dupont. Les capteurs intégrés sur les rampes du pulvérisateur restent à l’état de recherche. Plus chers à l’achat et moins accessibles, ils nécessitent du matériel de dernière génération pour assurer la gestion de l’information en temps réel.