À seulement 25 ans, Vincent Rimette a plusieurs innovations à son actif. Installé sur 45 ha à Offoy, dans le Santerre, il cultive son exploitation en commun avec celles de ses parents. Soit au total 220 ha, auxquels s’ajoutent 30 ha loués à des voisins pour la production de pomme de terre. Tout juste arrivé, il introduit du lin et des légumes d’industrie. Une vraie modification de la rotation historique de blé/betterave/blé/pommes de terre ! 25 ha sont convertis en agriculture biologique. « Mais avec 70 ha, la pomme de terre reste le cœur de notre activité. Avec de la chair ferme, de l’industrie et de la vente au détail, elle nous anime tous les jours », s’enthousiasme le jeune agriculteur.
Autre innovation, l’agriculture regénérative, découverte lors de ses études (BTS et ingénieur en agriculture). Avec quelques agriculteurs voisins, il crée le groupe Sols verts* sur l’agriculture de conservation des sols en système légumes et pomme de terre. Il vise une augmentation de la matière organique (les teneurs de ses sols varient de 1,5 à 2 %) et une amélioration de la vie du sol. Pendant 5 ans, ce groupe mène des expérimentations avec un professeur de l’Université Jules Verne d’Amiens. Objectif : augmenter les rendements tout en limitant l’empreinte carbone.
Des couverts d’été suivis par des couverts d’hiver
Les Rimette abandonnent les labours d’hiver avant les cultures de printemps dès 2018. « Nous avons conçu nous-même un semoir à dents avec une trémie frontale pour semer les engrais verts », explique l’agriculteur. Les couverts d’été sont semés juste après les moissons, sur la paille broyée. Vu le manque de pluviométrie estivale potentiel, Vincent privilégie un mélange d’été à coût modéré, variable selon la disponibilité des graines. Cet été, le mélange comprenait 1 kg de moutarde brune, 2,5 kg de radis chinois, 7 de tournesol, 5 de lin, 3 de nyger et 20 de vesce pour un coût de 35 €/ha. Il a délaissé la phacélie, dont seules 10 % des graines levaient. « Je recherche avant tout une bonne densité de pieds et de la biomasse racinaire », insiste-t-il.
Puis, entre le 15 et le 30 septembre, il sème les couverts d’hiver dans les couverts d’été. A l’avant du tracteur, le broyeur si besoin, à l’arrière le fissurateur, suivi de la herse rotative et du semoir. Il détermine la profondeur de travail du fissurateur, selon l’état d’un profil structural effectué au téléscopique. Sans tassement, 20 cm suffisent. Sinon, la profondeur atteint les anciennes semelles. « Le passage du fissurateur à l’automne garantit une homogénéité pour le travail de la fraise au printemps« , estime le jeune passionné. La fissuration permet aussi d’injecter 100 l de ferments par hectare à une profondeur de 20-25 cm. Ces derniers sont préparés à la ferme dans des cuves.
Avec une rotative réglée à 5 cm de profondeur, le sol est bien nivelé pour la future culture de printemps. Cette fois-ci, les espèces semées sont non-gélives. Vincent apprécie le mélange hiver de 25 kg de seigle, la même quantité en triticale, 100 kg de féverole et 2 kg de navette (coût de 50 €/ha).
Le producteur épand courant mars 100 unités d’urée ou de solution azotée directement dans le couvert. « Ainsi, la partie nitrique disponible, environ 25 %, est réorganisée directement par le couvert. Elle donne un véritable coup de boost au couvert », se réjouit-il. Il y associe 50 unités de magnésie et 100 de soufre, sous forme de Kieserit.
Plantations sur un réseau de racines
Début avril, dès que le sol ressuyé atteint 8°C, le planteur attelle son broyeur à l’avant et le rotavator Geohobel de la marque Rath à l’arrière du tracteur. Ce pionnier est l’un des premiers utilisateurs de France pour ce matériel autrichien. Celui-ci dispose de lames spécifiques qui scalpent 100 % du couvert à 5 cm de profondeur. Pour améliorer la décomposition des végétaux, Vincent Rimette ajoute 100 l de ferment. Le mélange de terre, d’oxygène, de ferments et de végétaux constitue un compost de surface.
Vers la mi-avril, il passe la fraise à 20 cm. « Au-delà de 20 cm, les racines forment un véritable maillage et assurent une bonne porosité et une structure favorable pour la future pomme de terre » se félicite le jeune homme. Il termine la plantation avec sa planteuse à courroies, en incorporant 100 l de ferment et le complément nécessaire en azote.
Vincent apporte aussi des thés de compost pour dynamiser ses plantes. En 2020, il a réussi la prouesse de ne traiter qu’avec deux fongicides. 2021 a été complétement différent. Avec la pluie fréquente, il a traité classiquement pour limiter le développement du mildiou.
Mais ce fan de couverts, dont l’objectif reste 100 % de couverture du sol, ne s’arrête pas à la récolte. Sur les arrachages précoces, il « remet le couvert » avec une implantation qui dure 1,5 à 2 mois avant l’implantation des blés d’hiver. Des racines qui structurent, toujours des racines.
*site https://www.facebook.com/SolsVerts/
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