Une nouvelle fois, le bilan de l’année écoulée est très positif pour la filière du bioéthanol, et en particulier pour le Superéthanol-E85. De nouveaux records ont été atteints en 2021. « Les volumes vendus d’E85 ont augmenté de 33 % au cours de l’année et le nombre de pompes à E85 a progressé de 18 % », s’est félicité le 25 janvier Sylvain Demoures, le secrétaire général du Syndicat national des producteurs d’alcool agricole (SNPAA). L’E85 a atteint une part inégalée de 4 % du marché des essences en France l’an passé, avec une pointe à 4,6 % en décembre. « Au total, le volume vendu a représenté 467 698 m3, soit une progression de 33 %, dans un marché des essences en progression de 21 % », a révélé Nicolas Kurtsoglou, responsable carburants du SNPAA.
Dans un contexte de flambée des prix de l’essence et du gazole, l’E85 a bénéficié d’un engouement inégalé, avec un prix à la pompe stable de 0,75 €/l. L’économie réalisée s’élève aujourd’hui à 657 euros en roulant 13 000 kms à l’E85, selon le SNPAA, contre 469 euros en 2020.
TotalEnergies, leader des pompes E85
Du côté des stations distribuant de l’E85, là encore, le contexte est à la forte progression, avec 420 nouvelles stations inaugurées sur le territoire, soit un total de 2 725. Ainsi, 30 % des stations proposent aujourd’hui de l’E85 en France métropolitaine, contre 25 % un an plus tôt. Parmi les distributeurs, TotalEnergies est le premier opérateur avec 840 stations dénombrées en janvier 2022 contre 765 un an plus tôt, suivi par Intermarché (705 stations) et Système U (297 stations). « Le mix produit change et nous oblige à adapter nos outils industriels et logistiques jusqu’à la distribution pour déployer ce réseau de 840 pompes sur le territoire, qui représente 40 % des stations du groupe », a expliqué Agnès Bernard, directrice du réseau de TotalEnergies Marketing France. Plusieurs centaines de milliers d’euros ont été investis par an. Sur 3 ans, le montant avoisine le million d’euros, selon Agnès Bernard.
Dans ce contexte, le parc automobile roulant à l’E85 augmente également. Selon le SNPAA, 10 millions de véhicules sont potentiellement équipables de boîtiers aujourd’hui. La reprise économique et la flambée des prix des carburants ont dopé la croissance des installations de boîtiers. FlexFuel Energy Development a installé 16 106 boîtiers, soit une progression de 77 % sur un an, avec des records de 2 000 boîtiers installés en octobre puis 3000 en novembre. Le parc de véhicules équipés de boîtiers E85 est estimé aujourd’hui à 135 000, dont 30 000 de plus en 2021. Parallèlement, le parc de véhicules flex-E85 d’origine a lui aussi progressé de près de 6 000 unités, pour en atteindre 45 000, grâce aux constructeurs Ford et Jaguar Land Rover (lire l’encadré).
Négociations européennes
Face à l’engouement des automobilistes, les professionnels français du bioéthanol préparent l’avenir. Ils souhaitent en particulier des aménagements dans la réglementation européenne pour accroître le développement de la filière. Le SNPAA souhaite que le plafond de 7 % d’incorporation de bioéthanol dans l’énergie des transports ne soit plus respecté par chaque État membre, mais mutualisé au sein de l’Union européenne. La moyenne européenne est à 4,5 %. « Les États membres ayant atteint 7 %, comme la France, pourraient incorporer davantage de biocarburants durables pour compenser ceux qui choisissent de rester très en dessous. Cette augmentation devra exclure le palme et le soja, impliqués dans la déforestation (déjà exclus du dispositif fiscal français) », a proposé Nicolas Rialland, directeur des affaires publiques et de l’environnement à la CGB.
Dans le cadre de la révision en cours du règlement européen sur les émissions de CO2 des véhicules légers (n°2018/842), la filière souhaite par ailleurs que la réglementation intègre une mesure des émissions de gaz à effet de serre (en équivalent CO2) en analyse de cycle de vie (ACV), tant pour l’énergie que pour le véhicule. « La réglementation actuelle est obsolète, à la fois pour les biocarburants dont la combustion émet du CO2 biogénique, sans impact sur le changement climatique, et à la fois pour les véhicules électriques car les productions de l’électricité et de la batterie émettent du CO2 », a souligné Nicolas Rialland. Autant de dossiers sur lesquels les professionnels du secteur devront porter leurs efforts à Bruxelles en 2022.
Les constructeurs automobiles qui ont fait le choix de l’E85 en 2021 peuvent se frotter les mains. 6 000 nouveaux véhicules flexfuel ont été commercialisés en France. Les ventes de Jaguar Land Rover et de Ford ont dépassé les attentes. Chez Jaguar, 501 E-Pace ont été vendus en version flexfuel, soit 55,36 % du mix, au-delà des 45 % estimés au départ. Chez Land Rover, 1 112 Range Rover Evoque et 376 Discovery Sport ont été commercialisés en flexfuel. Au total, l’objectif global de 1 500 véhicules vendus en flexfuel pour le groupe en 2021 a été pulvérisé. Chez Ford, les six modèles proposés en motorisation E85 ont représenté 65 % des ventes françaises du constructeur. L’objectif en 2022 sera d’atteindre 80 % pour les véhicules particuliers et 50 % (contre 20 % en 2021) en utilitaires. Deux nouveautés devraient permettre à Ford d’y arriver : un Puma disponible en hybridation légère E85 (mHEV), à partir de juin 2022, et la nouvelle version du Focus en hybridation légère E85, à partir d’avril.