Fin des quotas, jaunisse et suppression des néonicotinoïdes, impact climatique et pression des ravageurs accrue. La betterave, culture phare de la Champagne crayeuse, subit de nombreux aléas depuis quelques années. Avec des conséquences sensibles sur les rendements. Ces évolutions interrogent sur l’avenir de cette culture et de ses filières. L’étude Oser « Opportunités et stratégies pour les exploitations résilientes », réalisées par des experts des centres de gestion, des chambres d’agriculture, du Crédit Agricole et de Groupama et les acteurs des filières des grandes cultures rassure : oui, la betterave garde tout son intérêt en Champagne crayeuse et en Brie.
Maîtriser ses charges, un impératif
Mais pour cela, maîtriser ses charges s’avère indispensable. Les 25 % de planteurs les plus performants économiquement dépensent 1 963 € en charges opérationnelles et mécaniques par hectare de betteraves. Les 25 % des planteurs les moins performants dépensent 700 € de plus par hectare, soit 2 673 €. Et ce, alors que le rendement de betteraves obtenu varie peu entre les deux groupes (89,7 t/ha pour les moins performants économiquement et 93,3 t/ha pour le quart des plus performants). En fait, les charges supplémentaires n’apportent pas de productivité supplémentaire. Même si quelques tonnes de betteraves sont parfois récoltées en plus, elles ne permettent pas de payer 700 € de charges supplémentaires.
La technicité, et notamment l’agronomie, devient indispensable pour baisser les intrants. Ceux-ci varient de 718 €/ha pour le quart des betteraviers les plus économes contre 979 €/ha pour les moins économes. 261 euros d’écart pour aucun gain de productivité.
Le poste de mécanisation représente la plus grande voie de progrès. Le quart le plus performant ne dépense que 413 €/ha en mécanisation, contre 862 € pour les moins performants. Une différence de 450 €/ha.
Par contre, déléguer la récolte à un tiers n’a pas d’influence sur la performance économique des exploitations. 41 % de betteraviers aux meilleures performances économiques délèguent la récolte de betteraves, contre 45 % pour ceux obtenant les moins bons résultats économiques. Cette proportion similaire montre que l’externalisation de la récolte n’a pas d’influence sur les résultats financiers des betteraviers. Ce constat est aussi valable pour les semis de betteraves.
Des marges de progrès apparaissent néanmoins possibles. D’une manière générale, s’interroger régulièrement sur ses charges fait partie des stratégies performantes économiquement. La maîtrise des charges apparaît plus que jamais un élément déterminant de la rentabilité des exploitations.
Une culture encore compétitive
Autre constat, malgré les aléas subis : la betterave reste une des têtes d’assolement les plus rentables. Même si elle est descendue de l’estrade et se compare maintenant aux autres cultures, elle reste compétitive par rapport aux autres cultures de printemps. Un tableau comparatif montre qu’une marge brute de 1 000 €/ha peut être atteinte avec des rendements atteignables (77 t sans appel à une entreprise de récolte, 84,7 t avec une ETA). Dans cet exemple, seul le chanvre peut rivaliser en comparant les moyennes à 5 ans.
Le fait que les agriculteurs les plus performants économiquement cultivent plus de betteraves (18 % en moyenne), contre 8 % pour les exploitations à l’excédent brut d’exploitation (EBE) le plus faible corrobore son intérêt dans la rotation.
Reste que, pour redonner des perspectives à la filière, les experts d’Oser insistent sur les évolutions indispensables du progrès génétique et technologique. Autre évolution nécessaire, la prise de conscience, par les acteurs de la filière, que l’avenir de la betterave passera par une meilleure rémunération des planteurs. Ils mettent aussi en avant la création de l’assurance multirisques climatique, une meilleure valorisation potentielle de la betterave avec le label Haute valeur environnementale (HVE) et le bio et, enfin, la recherche de souveraineté alimentaire par les clients et les pouvoirs publics.