Jaunisse, cercosporiose, forte pression de rhizomanie (FPR) et nématodes. Ce pourrait être le quarté gagnant pour un semencier capable d’introduire les quatre gènes de résistance dans une variété qui serait ainsi capable de faire face aux principaux fléaux touchant la betterave à sucre.
Déjà, les variétés tolérantes aux nématodes et à la FPR ont fait de nets progrès ces dernières années et l’’Institut technique de la betterave (ITB) note de belles améliorations sur la tolérance à la cercosporiose. Mais le Graal est bien évidemment le gène de tolérance à la jaunisse, depuis que les néonicotinoïdes sont sur la sellette. « Les semenciers doivent intégrer toutes les demandes des betteraviers, les combiner, les ajouter les unes aux autres. On ne peut pas choisir entre la tolérance à la jaunisse, les nématodes et la FPR », explique Patrick Mariotte, directeur général de KWS France.
La jaunisse
La jaunisse est la priorité numéro un pour tous les sélectionneurs. Ceux-ci y consacrent d’ailleurs beaucoup d’énergie, comme le montrent les différents programmes de recherche Flavie et Probeet (voir BF 1135).
La jaunisse, c’est une maladie complexe causée par 4 virus : le BYV (Closterovirus), le BChV (Polérovirus), le BMYV (Polérovirus) et le BtMV (le virus de la mosaïque), plus ou moins présents selon les conditions climatiques.
Ainsi, en 2019, 72 % des virus étaient des BChV (jaunisse modérée). En 2020, c’est le BYV (jaunisse grave) qui a été le plus présent mais il était associé avec les 3 autres virus créant ainsi un cocktail détonant. Pour 2021, le principal virus était le polérovirus. Mais la grande question est : quand le virus de la jaunisse grave va-t-il frapper ?
Répondre à cette question consiste à chercher les gènes de résistance à tous les virus. « Avec le programme Aker qui s’est terminé l’année dernière, nous avons une ressource extraordinaire pour trouver des plantes tolérantes aux trois principaux virus de la jaunisse », estime Rémi Henguelle, directeur marketing betteraves de Florimond Desprez. « Nous avons augmenté notre capacité à produire des pucerons virulières. Nous avons séparé les sites de production de pucerons : nous travaillons avec un seul virus par site pour éviter les contaminations », explique Niels Wynant, phytopathologiste chez SESVanderHave.
« Nous sommes confiants. On voit beaucoup de différences entre les différentes génétiques que l’on peut exploiter, ajoute Jan Sels, responsable de la sélection pour la France chez SESvanderhave. Le but est de limiter significativement la multiplication du virus ainsi que le développement de symptômes et d’augmenter progressivement le potentiel de rendement ».
Frédéric Cannaert, responsable du développement chez Maribo est également confiant : « la variété présentée le 23 septembre dernier (voir BF 1134 p 15) a réalisé un rendement supérieur de 30 % par rapport à une variété sensible ».
D’ici 2024, les sélectionneurs vont améliorer les hybrides élites avec la résistance modérée. Puis, ils devraient sortir les premiers hybrides avec une résistance renforcée.
La forte pression de rhizomanie
Selon KWS, les variétés dotées d’une double source de tolérance fonctionnent bien. SESVanderHave développe aussi des variétés dotées de 2 sources de résistance Rz1 et Rz2 (des gènes mineurs et un fond génétique supportant les gènes de résistance).
Ces variétés dites « Tamdem technology » permettent de faire face au contournement du gène Rz1 dans plusieurs régions, notamment le sud de Paris.
Les nématodes
Les conditions estivales de cette année ont été favorables au développement des nématodes. La zone touchée s’est encore agrandie pour atteindre près de 30 % de la surface française de betteraves. Heureusement, le potentiel de rendement des variétés s’est bien amélioré. Même en cas de présence très diffuse de nématodes d’une parcelle cultivée, une variété tolérante constitue une assurance pour le rendement.
La cercosporiose
La cercosporiose est la maladie la plus pénalisante pour la betterave dans le monde. Elle touche environ 100 000 ha en France. Ce n’est plus un problème cantonné au sud de la zone betteravière. La grande nouveauté est que le Nord et la Normandie sont aussi touchés. Avec la diminution des traitements phytosanitaires, c’est une caractéristique qui devient indispensable.
L’innovation se poursuit : KWS a développé des variétés avec une tolérance accrue à la cercosporiose, nommées Cerco+, en maintenant un potentiel de rendement intéressant, même lorsque la pression est faible. Le processus d’inscription a débuté il y a 2 ans, lors du dépôt de deux variétés au Comité technique permanent de la sélection des plantes cultivées (CTPS). Ces variétés (Inspirea KWS et Blandina KWS) sont en première année d’expérimentation sur le réseau SAS/ITB. On doit encore apprendre à conduire les traitements sur ce type de variétés (nombre et cadence) avant qu’elles ne soient commercialisées à grande échelle.