Le 12 novembre, la tonne de blé cotait 293 € sur le marché de Rouen après avoir progressé de plus de 20 € en un mois. Sur Euronext, son prix n’a pas franchi le seuil de 300 € mais, ces derniers jours, il était à deux doigts de l’atteindre.
Ce mois-ci, tous les regards sont portés sur la Russie. Ses exportations (13 Mt) sont en repli de 16 % par rapport à la campagne passée mais 37 % de l’objectif de vente pour 2021-2022 sont déjà atteints (36,5 Mt), rapporte FranceAgriMer.
Selon le site Sovecon, spécialiste de la gestion des marchés en Russie, les agriculteurs stockeraient une partie de leur récolte de blé et reporteraient leurs ventes pour faire ainsi pression sur les prix. Ils n’apprécient pas les montants élevés des taxes à l’export imposées par le Kremlin. Mais pour Yuri Kovalev, le directeur du syndicat russe des producteurs de porcs, le jeu auquel se prêtent les céréaliers est dangereux. L’instauration de quotas après la période de Noël pourrait se traduire par un effondrement des cours par manque de débouchés.
Mais comme l’Ukraine a déjà expédié plus de la moitié du blé destiné à l’export (12,9 Mt sur 21,8 Mt) et 85 % de l’orge (4,79 Mt), le pays serait contraint de s’effacer au cours de la seconde partie de la campagne. Et comme l’Australie fait essentiellement des affaires avec ses voisins pacifiques, la Russie aurait alors les coudées franches pour exporter vers le bassin méditerranéen, dans la limite du quota que le pays pourrait s’imposer.
La demande ne tarit pas
Les prix record du blé ne dissuadent pas les pays importateurs de faire leurs emplettes. La demande ne tarit pas. 205 Mt de blé seront exportées dans le monde soit 7 Mt de plus que la campagne passée. Cette année, quatre pays importeront plus de 10 Mt de blé. Il s’agit de l’Égypte (13 Mt), de la Turquie (11 Mt), de l’Indonésie (10,4 Mt) et la Chine (10 Mt).
Les pays producteurs de pétrole (Algérie, Irak, Iran, etc.) sont aux achats. Les prix élevés du pétrole leur donnent les moyens financiers nécessaires pour payer plus cher leurs grains importés. « Mais bon nombre d’entre eux mettent en œuvre des subventions à la consommation pour atténuer l’impact des fluctuations de prix sur leurs populations, gardant souvent la demande des consommateurs à l’abri des prix élevés », explique l’USDA, le département américain de l’Agriculture.
L’Égypte est plus prudente. Le pays tempère ses achats et diversifie en Europe ses sources d’approvisionnement. Il mise sur une baisse des prix durant la seconde période de campagne pour acheter du blé moins cher. Quant à la Chine, elle déstocke pour mieux importer (10 Mt).
Sur le marché mondial du blé, la France est en peloton de tête. Selon le Cabinet Agrex Consulting, notre pays est le 4ème pays producteur le plus compétitif au monde derrière la Russie, les États-Unis et le Canada. Le 9 novembre dernier, il présentait une étude au terme du Conseil spécialisé en grandes cultures de FranceAgriMer.
La production française de blé est très compétitive car les rendements sont très élevés (80 q/ha). Aussi, les coûts de production rapportés à la tonne produite sont parmi les plus faibles. Par ailleurs, notre pays est organisé pour exporter toute l’année du blé de qualité meunière à 97 %. Pour chaque quintal produit dans l’Hexagone, un agriculteur perçoit environ de 2 € d’aides publiques (PAC), soit 3 € de moins qu’aux États-Unis. Seuls les céréaliers argentins et australiens produisent sans soutiens publics.
Dans l’Union européenne, les montant des aides PAC rapportées au quintal de blé produit varient quasiment du simple au double (3,5 €/q en Roumanie) car les rendements entre les pays sont très hétérogènes. Mais les céréaliers allemands perçoivent 90 € d’aides par hectare en plus que les Français.