Une grande partie de l’humanité compte toujours sur la pomme de terre pour se nourrir. Il n’existe pas, à proprement parler, un marché mondial de la pomme de terre mais une constellation de plusieurs marchés nationaux et régionaux. La pomme de terre reste d’abord cultivée pour être consommée là où elle est produite. Et quand elle est exportée, elle est transportée sur des distances relativement faibles, sur quelques centaines de kilomètres tout au plus. La pomme de terre est une denrée périssable et pondéreuse.
L’impossibilité de structurer à l’échelle mondiale la production de pommes de terre rend difficile la collecte de données récentes, mais la FAO estime que le monde produit entre 365 et 370 Mt de pommes de terre chaque année depuis 2015. Après une décennie de stagnation, sa production est appelée à croître de 0,9 % par an en moyenne.
En 2020, dix pays produisent les deux tiers de la production mondiale de pommes de terre. Et parmi eux, figurent les premières puissances économiques la planète. En l’occurrence, les États-Unis, la Chine, l’Allemagne et la France.
En Chine, premier pays producteur au monde (99 Mt selon l’USDA en 2020), la pomme de terre est cultivée sur l’ensemble du territoire et elle est récoltée toute l’année : chaque automne au nord du pays et chaque printemps, au sud. Les campagnes de production sont très liées aux différents climats observés dans le pays. Depuis dix ans, la production a augmenté de près de 20 Mt et elle est appelée à croître continûment.
Toutefois, la moitié de la production chinoise de pommes de terre est localisée dans le nord du pays, le long de la façade océanique (The Northern Single Crop Zone du territoire).
L’Inde (50 Mt depuis deux ans) est le deuxième pays producteur au monde ; sa produstion a augmenté de 10 Mt en dix ans.
Dans l’Union européenne, les 8 pays occidentaux de la façade ouest et la Pologne ont récolté près de 38 Mt de pommes de terre en 2020.
Dans ces pays, la pomme de terre est rarement cultivée pour être exportée telle quelle en frais. Les échanges commerciaux entre pays exportateurs et pays importateurs, portent sur des quantités marginales.
L’exception française
La France fait figure d’exception : sur les 8,56 Mt de pommes de terre produites, entre 2,3 et 2,5 Mt de pommes de terre de conservation sont exportées chaque campagne, à destination du marché du frais (près de 55 % des volumes) et de l’industrie de la transformation (près de 45 % des volumes).
Il y a dix ans, la production mondiale de pommes de terre était déjà de 370 Mt environ, mais elle était répartie différemment. La Chine et l’Inde en produisaient 30 Mt de moins qu’actuellement. En revanche, la Pologne en récoltait 9 Mt, soit 50 % de plus qu’aujourd’hui et la Russie (22 Mt), soit 10 Mt de plus qu’aujourd’hui.
La stabilité de la production de pommes de terre en Ukraine caractérise l’économie moribonde du pays. Ce dernier n’a pas bénéficié des atouts de l’intégration européenne dont a profité la Pologne à partir de 2004. En Ukraine, la pomme de terre reste un aliment de base.
La pomme de terre a même été adoptée par les consommateurs des pays qui n’en produisaient pas historiquement. Elle fait ainsi partie du régime alimentaire, de plus en plus occidentalisé, des Chinois et des Indiens.
De moins en moins consommées en frais
La pomme de terre est à la fois un aliment de base et une matière première transformable en produits élaborés, au gré de l’évolution des habitudes alimentaires et des besoins des consommateurs.
Dans les pays où le pouvoir d’achat des ménages est très important, elles sont de plus en plus consommées transformées et hors foyers (frites, potatoes, purée etc).
Au Nord de l’Union européenne par exemple, la baisse de la consommation en frais a été compensée par l’essor de l’industrie de la transformation et par l’exportation de produits à base de pommes de terre.
En Pologne, les habitudes alimentaires changent. Elles sont de plus en plus influencées par celles importées d’Europe occidentale. Pour autant, la pomme de terre reste incontournable.
Dans les pays où le pouvoir d’achat est plus faible, les pommes de terre sont essentiellement consommées en frais. C’est notamment le cas en Ukraine (on l’a vu) mais aussi en Chine.
Dans l’empire du milieu, 60 % des pommes de terre récoltées sont consommées en frais, dans les foyers ou dans les restaurants, selon l’USDA. Seules 10 % sont transformées.
La Chine n’est pas organisée pour conserver dans des hangars aménagés les pommes de terre toute une campagne, le temps de les transformer. Aussi, les usines ne fonctionnent qu’entre quatre et six mois chaque année. Les importations de pommes de terre de pays tiers alimentent certaines usines pour fonctionner toute l’année.
Dans l’Union européenne, la campagne commerciale de pommes de terre 2020-2021 a été plombée par la crise sanitaire de la Covid 19. Les conditions imposées par les transformateurs pour conclure les contrats de collecte l’automne prochain n’anticipent pas une reprise très forte de l’activité économique. Mais en ce début septembre, leurs prévisions semblent démenties.