Un article de notre partenaire européen Euractiv.
Après des mois d’âpres négociations, un compromis sur la nouvelle PAC était sur la table, vendredi 25 juin. Le Parlement, le Conseil et la Commission européenne se sont notamment accordés sur la question des éco-régimes (les paiements directs conditionnés aux engagements verts), finalement fixés à 25 %, la conditionnalité sociale (qui sera appliquée à partir de 2025) et un alignement de la PAC sur les objectifs du Pacte Vert de l’UE, le Green Deal.
Réunis à l’occasion d’un Conseil Agripêche le lundi 28 juin, les ministres européens de l’Agriculture ont approuvé l’accord de principe – le Parlement européen devra de son côté voter le projet de réforme lors d’une de ses prochaines séances en plénière pour que la nouvelle PAC puisse entrer en vigueur au 1er janvier 2023.
La nouvelle PAC, ambition vs statu quo
Côté français, le ministre de l’Agriculture Julien Denormandie se « félicite de cet accord qui est un bon accord pour la France ». Le compromis trouvé lors du dernier trilogue « conforte les orientations que la France a défendues tout au long de cette négociation et permet la préparation du plan stratégique national (PSN) conformément aux orientations annoncées le 21 mai », selon un communiqué du ministère.
Le PSN, déclinaison nationale des objectifs de la PAC, avait pour autant suscité de vives réactions, notamment de la part de la filière bio qui craint une « mise à nu » de ces exploitants dans le cadre de la réforme.
En outre, si « l’ambition environnementale de la PAC sera renforcée sur l’ensemble du territoire de l’Union européenne » selon le ministère, elle ne va pas assez loin pour les écologistes français. « Rien ne va dans cet accord », fustige l’eurodéputé vert Benoît Biteau pour qui la réforme sur la table est « un désastre » : « Elle est une copie de la PAC précédente sans imagination, sans ambition et surtout sans effet sur le dérèglement climatique », soutient l’eurodéputé dans un communiqué publié vendredi. La seule option pour lui : un rejet de l’accord par le Parlement lors du vote en deuxième lecture.
C’est un tout autre avis que défend la FNSEA, principal syndicat agricole en France : le contenu de l’accord « est tout sauf un statu quo pour les agriculteurs », soutient-elle dans un communiqué, notamment en ce qui concerne la conditionnalité environnementale des aides. Pour le syndicat, « l’accord répond à de nombreux points sensibles que nous avions soulevés. La FNSEA avait en effet alerté depuis longtemps les gouvernements et les parlementaires européens […] sur un pourcentage d’éco-régimes trop important ».
Si le compromis en la matière prévoit finalement que 25 % du budget du premier pilier de la PAC soient accordés aux éco-régimes, il instaure aussi un « plancher » fixé à seulement 20 % : pendant une « période d’apprentissage » de 2 ans, soit jusqu’en 2025, les États membres auront ainsi le droit de redistribuer les 5 % restants si ceux-ci ne seront pas utilisés dans les temps.
Vignes, betteraves : ce qui changera pour la France
Parmi les dispositions de l’accord, deux points sont en outre particulièrement intéressants pour la France. D’une, « les outils de régulation du secteur vitivinicole […] sont confortés sur la future programmation », selon le ministère de l’Agriculture. Le dispositif des autorisations de plantations de vignes aura ainsi été prolongé jusqu’en 2045. Et l’article 172b de la réforme sur la table prévoit la possibilité pour les organismes interprofessionnels des vins de fournir des prix indicatifs concernant la vente de raisins pour la production de vins sous indication géographique.
Deuxièmement, dans une déclaration conjointe, le Conseil, le Parlement et la Commission « reconnaissent les difficultés que rencontre le secteur sucrier après l’abolition des quotas de sucre en octobre 2017 », une situation caractérisée par « l’instabilité sur les marchés internationaux, la stagnation de la consommation et le déclin de la production de betteraves sucrières et de sucre » et donc une « source d’inquiétude pour le secteur » dans l’UE.
Ainsi, les institutions promettent de mener une étude à l’automne 2021 pour analyser les stratégies d’adaptation et de résilience de la filière sucrière. Sujet épineux en France : la ré-autorisation, en février 2021, de l’emploi de néonicotinoïdes – des insecticides considérés comme « tueurs d’abeilles » par les écologistes et officiellement interdits en France comme dans l’UE depuis 2018 – pour soutenir la filière de betteraves sucrières avait suscité la controverse. Affaire à suivre.