Dans les essais conduits cette année, le repiquage et le semis sous bâche présentent des performances intéressantes par rapport à un semis classique. L’implantation avec un alignement perpendiculaire des betteraves à la direction du semis a lui connu des difficultés, mais il reste une piste de travail pour les années à venir.

Certains dispositifs expérimentaux ont une nouvelle fois été l’occasion de démontrer qu’il est nécessaire, en bio, de tester le plus tôt possible les outils de désherbage mécanique au champ, et de mettre de côté les conseils d’intervention issus de la production conventionnelle.

Plusieurs essais ont été conduits durant la campagne 2020 par l’ITB, notamment en collaboration avec les services agronomiques des sucreries. Un projet financé par la région Normandie et l’Union européenne a été accepté; il engage l’ITB à mener, pour deux années encore, des essais avec la Chambre d’agriculture et Saint-Louis Sucre sur la production de betteraves en agriculture biologique. Les références techniques et les apprentissages s’enrichissent donc sur un mode de production qui monte en puissance. L’année 2020 a été particulière avec l’impact de la jaunisse et le climat sec qui ont touché la plupart des régions concernées par les essais : certains résultats obtenus seront donc à valider durant les prochaines campagnes.

Le semis « pour binage intégral » : un guidage RTK de qualité et une expertise sont nécessaires

Pour rappel, cette technique d’implantation repose sur la technologie Geoseed de Kverneland. Elle permet un alignement des betteraves perpendiculaire à la direction de semis. L’objectif est de pouvoir biner dans les deux directions, celle du semis, et celle perpendiculaire à la direction du semis, afin de gérer une partie des adventices présentes dans le rang, et ainsi réduire le temps de désherbage manuel. Selon les bineuses disponibles dans l’exploitation, l’espacement des betteraves peut être ajusté pour augmenter la population au champ (exemple : semis 45×45 cm, 45×30 cm etc.).

Deux plateformes expérimentales ont mis en place ce mode d’implantation, mais avec un défaut d’alignement ne permettant pas de biner en perpendiculaire. Cela vient confirmer la nécessité d’un signal GPS optimal, sans coupure, d’un guidage RTK, et d’une certaine expertise (les équipes Kverneland n’ayant pas pu se déplacer avec les règles sanitaires en vigueur).

Cette technique n’est pas simple d’appropriation, mais elle a montré un véritable intérêt sur des essais antérieurs réalisés par la délégation ITB de l’Aisne.

Un bon niveau de rendement du semis sous bâche

L’essai de Bazancourt, conduit en collaboration avec Cristal Union, a comparé une implantation de semis sous bâche noire, percée aux emplacements des graines, par rapport à un semis classique. L’intérêt de ce genre de dispositif est double : avoir un réchauffement plus rapide du sol pour accélérer le développement des betteraves, et faciliter la maîtrise du salissement grâce à l’opacité de la bâche, qui empêche la levée des adventices.

L’avance de végétation grâce à la bâche a clairement été constatée sur cet essai; elle se traduit sur le rendement obtenu. La maîtrise du salissement a été bonne : du désherbage manuel a tout de même été nécessaire pour enlever les adventices aux pieds des betteraves et aux endroits où le raccord était mal fait, ainsi qu’une intervention mécanique au niveau de l’inter-bâche. Les inconvénients restent tout de même la dégradation de la bâche, qui n’était pas totale au moment de la récolte, et le surcoût, qu’il faut confronter au bénéfice rapporté par la technique sous plusieurs situations pédoclimatiques.

Optimiser la conduite du repiquage

Sur les deux essais conduits par l’ITB, à Bazancourt, et à Vesles-et-Caumont, les modalités de repiquage ressortent avec un rendement nettement supérieur à la modalité de semis classique (figures 1 et 2). Sur l’essai de Vesles, il a été estimé un temps de désherbage mécanique de 65h/ha sur le semis classique, contre 6h/ha sur la modalité de repiquage. L’essai a confirmé l’intérêt présupposé du repiquage vis-à-vis des dégâts de ravageurs souterrains. La partie de l’essai semée classiquement a été fortement affectée par des pertes de pieds dues à des blaniules, tandis que la partie repiquée n’a subi aucune perte de ce fait.

Enfin, ce dispositif a aussi testé plusieurs densités de population repiquées, avec notamment l’objectif de regarder la réponse à des populations plus faibles que ce qui était en place jusqu’à maintenant (autour de 65 000 plants/ha). L’intérêt de cette réduction est double : une baisse conséquente du coût de repiquage, puisqu’un plant coûte environ 3 cts, et une amélioration de la qualité de repiquage pour des repiqueuses non automatiques. En effet, pour ce dernier point, réduire la densité permet d’accélérer la vitesse du tracteur, du fait d’un personnel moins limitant sur la repiqueuse, et ainsi d’obtenir un travail de meilleur qualité. Les résultats de rendement (figure 3) laissent penser qu’une réduction de la densité serait adaptée. Les écarts de rendement entre les modalités sont relativement faibles, du fait notamment d’une sélectivité des interventions de désherbage mécanique, légèrement moins bonne sur les densités les plus élevées. Cependant, ces enseignements sont à confirmer sur de nouveaux essais.

Tester le plus tôt possible le désherbage mécanique

La règle de tester l’outil de désherbage mécanique au champ, le plus tôt possible, ne sera jamais assez répétée. Cette année encore, la démonstration en a été faite sur les essais de Bazancourt et de Vesles, qui ont subi des conditions de levée très difficiles avec le temps sec post-semis. Une première intervention à la herse étrille a été réalisée avant la levée complète des betteraves, encore au stade de cotylédons. Pour le site de Bazancourt, un semis particulièrement profond (entre 3 et 4 cm) a été réalisé pour aller chercher un peu de fraîcheur, et a peut-être permis de faciliter ce passage. Globalement, l’intervention s’est révélée efficace (figure 4) avec, dans ces conditions, un niveau de sélectivité acceptable pour de la production biologique.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Dans les essais conduits, le repiquage et le semis sous bâche ont présenté des résultats de rendement intéressants dans les conditions particulières de cette année.

Le semis pour « binage intégral » reste une piste à travailler dans les années à venir.

Il est nécessaire, en production biologique, de tester le plus tôt possible le matériel de désherbage mécanique au champ. La réalisation d’interventions précoces est primordiale pour maîtriser le salissement.