En observant les analyses de sol en Champagne, on constate une baisse des teneurs des sols de -12 % en P205 depuis dix ans. La réduction continue des fertilisants phosphatés est un facteur aggravant. La coopérative Vivescia a noté une baisse de consommation d’engrais minéraux de 40 % sur les 10 dernières années, « avec des apports qui ne couvrent plus l’exportation des cultures », notait Philippe Gérard, expert fertilisation de Vivescia, lors des journées du Comifer 2020.
L’apport de P2O5 rentable
Les apports en phosphore du colza sont d’autant plus nécessaires s’il existe des risques de blocage dans le sol. C’est le cas dans les terres de craie et les argilo-calcaires. Quand le pH dépasse 8, avec une présence de calcaire actif, le sol exerce un fort pouvoir fixateur vis-à-vis du phosphore. Cet élément risque de ne pas être disponible pour la culture quand elle en a besoin. « Il faut raisonner la fertilisation phosphatée en investissement et non en charge », estime Philippe Gérard. Dans la moyenne des essais Vivescia, 100 € investis permettent de gagner 150 € sur le colza et jusqu’à 8 à 10 q/ha en sol de craie. Selon la coopérative, les meilleurs gains nets sont obtenus avec un apport de phosphore au plus près de l’installation de la culture, surtout si les teneurs du sol sont faibles. C’est au stade de 5-6 feuilles que le colza se montre plus sensible à la carence.
Azote : fractionner pour économiser
Pour gérer l’azote au plus juste sur le colza, deux critères sont à prendre en compte : la biomasse produite par le colza et l’objectif de rendement. La pesée à l’entrée et à la sortie de l’hiver reste facile à appliquer pour calculer les besoins, qui peuvent être très différents entre un petit et un gros colza. En revanche, l’objectif de rendement est plus difficile à fixer. « Cet objectif doit tenir compte des dégâts d’insectes, de l’hydromorphie ou du salissement de la parcelle », estime Nicolas Latraye, ingénieur chez Terres Inovia. Quelle que soit la situation, le fractionnement de l’azote permet de bien ajuster l’apport total. Pour les colzas à faible biomasse en sortie hiver, Terres Inovia conseille un apport précoce de 20 et 40 unités dès que la réglementation le permet. Pour les colzas à forte biomasse, il est au contraire conseillé d’attendre la montaison pour le premier apport d’azote car la culture est capable remobiliser ses réserves accumulées.