Pourquoi cultiver la cameline ? Cette plante de la famille du colza n’est pas totalement nouvelle, puisqu’elle a été produite en France jusqu’au xixe siècle. L’intérêt de la cameline provient de ses graines, qui fournissent une huile de couleur dorée et d’odeur piquante. On l’utilisait dans le passé dans la fabrication des vernis où elle remplaçait parfois l’huile de lin. L’huile de cameline brûle en donnant moins de fumée que celle du colza. Elle peut être utilisée comme carburant, mélangée au gazole jusqu’à hauteur de 30 %. C’est sur ce créneau que l’on teste actuellement la plante. Les chambres d’agriculture de Normandie se sont engagées pour trois ans dans un projet d’expérimentation en partenariat avec la coopérative de Creully et Agrial, en liaison avec Saipol, filiale du groupe Avril. D’autres tests sont conduits en Bourgogne et Pays de la Loire.
Une plante sobre
La cameline réapparaît progressivement dans les champs depuis quelques années notamment grâce à l’intérêt croissant des agriculteurs bio. Contrairement au colza, la cameline a un cycle très court. Elle se récolte trois ou quatre mois seulement après le semis. La plante se contente de terrains pauvres et n’exige pas de fertilisation sauf si le sol manque de soufre. « La cameline résiste bien mieux que le colza aux fortes chaleurs et au manque d’eau, à condition toutefois que la pluviométrie soit suffisante jusqu’à sa floraison », selon l’Institut technique de l’agriculture biologique (Itab). Autre avantage : « Son système racinaire pivotant permet de structurer le sol en profondeur. La cameline est aussi une plante mellifère à une période où peu de cultures sont en fleurs », estime Guillaume Mesnildrey, chargé de mission à la Chambre d’agriculture de Normandie. Les essais réalisés dans la plaine de Caen sont conduits dans un objectif « zéro phyto ». Sa production est testée en interculture sur trois campagnes successives, de 2020 à 2022. Son cycle ultracourt doit permettre de la récolter avant mi-octobre. « Bien que plante à cycle court, son développement en vue d’une récolte au plus tard mi-octobre implique un semis précoce, ce qui restreint la zone éligible d’un point de vue climatique au sud de la plaine de Caen. Malgré ces avantages, la possibilité d’intégrer la cameline dans les assolements reste bel et bien à démontrer. Les conclusions seront tirées de ces trois années d’expérience », ajoute-t-il prudemment.
Un cycle de quatre mois
La cameline peut aussi s’envisager comme une culture à part entière, semée entre la mi-avril et la mi-juin, à faible densité. Elle permet de remplacer les cultures d’hiver dont le semis a échoué ou de servir de couvert végétal semé en fin de printemps. La plante peut aussi être associée à une autre culture de printemps telle que la lentille, à laquelle elle sert alors de tuteur. Sa graine minuscule doit être semée très superficiellement et placée en contact étroit avec la terre, ce qui nécessite parfois un roulage après semis. L’objectif est d’obtenir une centaine de plantes levées par mètre carré. Sur le plan agronomique, la cameline affiche une remarquable sobriété et s’avère peu sensible aux parasites et ravageurs. Elle a en outre un effet nettoyant, limitant les levées d’adventices qui germent au printemps (chardons, laiterons…). En contrepartie, le rendement reste modeste : 10 à 20 quintaux en culture associée dans les systèmes bio, voire un peu plus si cultivée seule.