Le sucre roux est passé sous les 10 cts/lb en séance ! Il se maintient désormais autour de 10,5 cts/lb, mais les fondamentaux mondiaux restent robustes. Comme beaucoup, l’analyste F.O.Licht considère dans son premier bilan du 6 avril que la production brésilienne, lors de la campagne ouverte en début de mois, progressera bien de 9 Mt par rapport à l’an dernier : le pays pourrait ainsi produire 39,6 Mt de sucre. On revient donc à un niveau de production standard pour le pays, en ayant un peu trop vite oublié que les deux campagnes passées avaient été exceptionnelles en termes d’allocation de la canne vers l’éthanol. F.O.Licht anticipe également une consommation mondiale atone pour la campagne en cours alors qu’on estimait, jusqu’à présent, une hausse de cette consommation de l’ordre de 2 Mt.
Pourtant, le déficit mondial reste majeur dans le cadre de la campagne actuelle : -9,6 Mt. Et il semble qu’il se poursuivra l’an prochain, autour de -1,5 Mt. Car, une nouvelle fois, les chiffres de production en provenance d’Asie avaient été bien mal estimés … On savait que l’Inde ne devrait produire que 28 Mt, contre presque 36 Mt l’an dernier. Mais c’est de Thaïlande qu’arrive la plus grande surprise : le pays ne devrait pas atteindre les 8,5 Mt, du fait d’une sécheresse bien plus sérieuse qu’estimée, contre 14,8 Mt la campagne précédente. Le pays pourrait même ne pas parvenir à produire 8 Mt durant la campagne suivante !
Entre-temps, les effondrements monétaires et la chute du pétrole rendent tout le monde frileux … Et les spéculateurs s’y engouffrent, nets vendeurs désormais de plus de 2,6 Mt
Prime de blanc
Les valeurs du sucre actuelles sont-elles donc exagérées et va-t-on assister à un retournement ? Difficile à dire tant que les monnaies sont à ce point torturées. Mais notons néanmoins que le sucre raffiné résiste mieux : la prime de blanc (différence entre le sucre brut et le sucre raffiné) dépasse les 100 $/t, pas loin du double d’il y a six mois. Cela confirme que les disponibilités sont avant tout attendues du Brésil (producteur majoritaire de roux) et que les bilans sont bien plus tendus dans les pays producteurs de sucre blanc (Inde, Thaïlande, Europe).
D’ailleurs, ce bilan tendu européen commence à se refléter dans nos prix. La Commission européenne a dévoilé les prix du sucre livré en février dernier : pour la zone incluant la France, ils sont à 358 €/t, soit 11 €/t de plus que le mois précédent. Tout l’enjeu de la filière sera désormais de conserver cette progression européenne, car elle reflète bien les fondamentaux à l’œuvre dans l’Union.
Timothé Masson, CGB