C’est une douche froide qui est tombée, ce 14 février, sur la filière française de la betterave-sucre. Dans le cadre de la restructuration de ses activités sucrières en Europe, le groupe allemand Südzucker, via sa filiale française Saint Louis Sucre, a annoncé le projet de fermeture des sucreries d’Eppeville (Somme) et de Cagny (Calvados) dès la campagne 2020-2021. Cela représente 36 000 ha de betteraves (21 000 ha à Eppeville et 15 000 ha à Cagny) et 500 000 tonnes de sucre soit près de 10 % de la production française. « Cette décision unilatérale est un coup terrible pour 2 500 planteurs de betteraves soit 50 % des agriculteurs de Saint-Louis Sucre, issus de bassins de production compétitifs », annonce la CGB dans un communiqué, qui se dit mobilisée pour défendre les planteurs concernés. Le syndicat entend tout mettre en œuvre pour préserver la capacité industrielle française à produire du sucre, maintenir les bassins de production et assurer un débouché rémunérateur aux planteurs de betteraves français.
« Ce projet répond à la nécessité de s’adapter à la nouvelle donne du marché du sucre : libéralisation du marché européen depuis octobre 2017 avec la suppression des quotas, surproduction à l’échelle mondiale et chute des prix sans précédent sur les marchés mondiaux et européens, explique Saint Louis Sucre dans un communiqué. Il s’inscrit dans un contexte de pertes de la branche sucre du groupe Südzucker, l’amenant à devoir adapter ses capacités de production à la demande du marché européen ».
Les activités d’Eppeville transférées vers la sucrerie de Roye
Saint Louis Sucre indique employer 770 salariés permanents en France et travailler avec 4 733 planteurs. Le site d’Eppeville compte 132 salariés, dont 23 au titre des services centraux. Il est approvisionné par 1 268 planteurs. Le site de Cagny, approvisionné par 1 036 planteurs, compte, lui, 85 salariés permanents.
Dans le détail, le plan présenté par Saint Louis Sucre à ses partenaires sociaux prévoit que l’essentiel des activités de la sucrerie d’Eppeville soit transféré vers les deux établissements de Roye (Somme) distants de 25 km, ce qui se traduirait par un changement du lieu de travail pour 122 salariés d’Eppeville. Le site d’Eppeville cesserait sa production de sucre ainsi que la production d’alcool de sa distillerie. Il recentrerait son activité sur le stockage de sucre, sirop et mélasse ainsi que sur l’activité de déshydratation de pulpes. Les betteraves seraient traitées par la sucrerie de Roye, avec un ajustement de volume. Le centre de stockage d’Aulnois, rattaché à Eppeville, cesserait son activité. L’effectif envisagé à terme sur le site d’Eppeville serait de 10 salariés.
La sucrerie de Cagny arrêterait la production de sucre et recentrerait son activité sur le stockage de sucre, de mélasse et la production d’alimentation animale à partir de mélasse, activités qui nécessiteraient 8 emplois. Le traitement d’une partie des betteraves serait assuré par la sucrerie d’Etrépagny (Eure).
Un rendez-vous entre la CGB et Südzucker
La CGB prévoit dans les prochains jours une rencontre entre son président et les dirigeants de la filiale française du groupe Saint-Louis Sucre pour envisager les différentes options. « Des sucreries qui disparaissent ce sont autant de conséquences irréversibles pour des agriculteurs, des emplois locaux et des territoires. C’est pourquoi nous nous mobilisons pour défendre et trouver des solutions pour le devenir des planteurs et l’avenir des sites industriels d’Eppeville et de Cagny » a réagi Franck Sander. Le président de la CGB a également demandé à être reçu par le président de Südzucker dans les plus brefs délais. « D’autres contacts sont également en cours auprès des dirigeants politiques nationaux et locaux », affirme le syndicat qui appelle à ce que « toute décision qui viendrait remettre en cause les capacités industrielles ou agricoles à produire du sucre de betterave soit mûrement réfléchie et concertée ». « Il est primordial de ne pas compromettre une excellence agronomique et industrielle que la filière a mis de nombreuses années à bâtir », insiste le syndicat de planteurs.
Adrien Cahuzac