L’article L. 411-35 alinéa 5 du code rural interdit au preneur de sous-louer ses terres à un tiers. Cette interdiction s’applique quels que soient ses motifs, sa durée et son étendue, dès lors que l’agriculteur demande une contrepartie. La jurisprudence en la matière est abondante et relève d’une appréciation des faits. Les juges ont notamment qualifié de sous-location prohibée la mise à disposition de terres louées au profit d’un tiers en vue de la production de pommes de terre, sans que le preneur ne réalise aucune culture et ce, moyennant une somme forfaitaire (Cour de cassation, 18 décembre 2002). La même décision avait été prise pour un contrat de culture de lin en 1996 ainsi que pour un contrat de coproduction de melons pour une campagne, le preneur s’engageant, moyennant rémunération, à exécuter les travaux préparatoires à la terre, afin que le « sous-preneur » procède à la mise en place de la culture et assure la conduite de la production. Cette qualification peut s’étendre aux contrats de production d’endives. On parlera aussi de sous-location prohibée pour un contrat passé entre le preneur et un tiers qui met à la charge de ce dernier l’entretien du fonds de façon continue, ou, le fait pour le preneur d’exploiter une production sur le fonds loué en association avec un tiers.
En revanche, la prise en pension d’animaux appartenant à un tiers ne constitue pas toujours une location prohibée. Cette qualification n’est retenue que si elle opère un transfert de jouissance. Autrement dit, les juges recherchent si le preneur s’est déchargé sur le tiers de l’entretien des pâturages et ce, indépendamment du montant de la rémunération, du nombre d’animaux et de la surface concernés. Ne constitue pas non plus une sous-location prohibée, la mise à disposition du droit personnel de chasser du preneur.
Des sous-locations autorisées
Le code rural prévoit quelques exceptions à l’interdiction de sous-location. Dès lors qu’il s’agit de dérogations au principe, il convient de les appliquer de manière très prudente. À défaut, le risque de résiliation du bail est encouru. Parmi les exceptions, citons celles permettant au preneur de sous-louer des bâtiments d’habitation à condition d’avoir l’autorisation préalable et écrite du bailleur (attention, l’accord écrit doit comprendre certaines mentions obligatoires). En cas de refus, aucun recours n’est possible. Le preneur peut aussi sous-louer, pour un usage de vacances ou de loisirs. Cette dérogation s’applique aux bâtiments ou aux terres, permettant ainsi l’accueil d’un camping provisoire. Là encore, les conditions d’application de cette dérogation sont strictes. La durée de la location doit être au maximum de trois mois consécutifs, sans droit au renouvellement ou au maintien dans les lieux pour le sous-locataire. De plus, là encore, l’autorisation du bailleur est obligatoire. En cas de contestation, le preneur peut saisir le tribunal paritaire des baux ruraux (TPBR). À défaut, le locataire encourt la résiliation de son bail et s’expose à des dommages-intérêts, même si la sous-location n’a pas compromis la bonne exploitation du fonds (Cour de cassation, 2 juin 1993). Enfin, citons l’autorisation pour le preneur d’héberger dans les locaux d’habitation loués ses ascendants, descendants, frères et soeurs, ainsi que leurs conjoints ou leurs partenaires de Pacs. Peu importe qu’ils ne travaillent pas sur l’exploitation.
De lourdes sanctions
L’interdiction de sous-louer étant une règle d’ordre public, l’introduction d’une clause dans le bail pour l’autoriser serait nulle. Le bailleur peut agir devant le TPBR en nullité malgré l’accord qu’il aurait donné à la sous-location, afin de la voir déclarer nulle. Le preneur principal encourt la résiliation de son bail, même si la sous-location n’est que partielle ou qu’elle a cessé avant le procès que lui a intenté le propriétaire. Par ailleurs, le preneur perd le droit de céder son bail au profit de son conjoint, son partenaire pacsé ou ses descendants, au motif qu’il est de mauvaise foi. Enfin, le preneur peut être condamné au paiement de dommages-intérêts résultant de l’inexécution du bail.
Alexandra Bonne